La Tomographie par Cohérence Optique (OCT), technique d'imagerie non invasive, mise au point en 1991, est depuis utilisée pour visualiser les différentes couches de la rétine invisibles avec un fond d’œil traditionnel. Vingt-trois ans plus tard, l'OCT-A, conçue par l’équipe du Pr David Huang pour Optovue en 2014, a émergé comme une extension de l’OCT via l’intégration d’un algorithme dit SSADA (Split Spectrum Amplitude Decorrelation Angiography). Le XR Avanti d’Optovue a ainsi permis les premiers examens OCT-A. En 10 ans, ce sont ainsi près de 2500 dispositifs équipés de la technologie OCT-A Optovue qui ont été installés à travers le monde. Cet anniversaire est d’ailleurs l’occasion de rendre hommage au Professeur Bruno Lumbroso, récemment disparu. En tant que l’un des piliers fondateurs de l’imagerie maculaire moderne, il a en effet largement contribué à la compréhension et à la démocratisation de l’OCT-A.
David Huang, M.D., Ph.D., (à droite) présentant la technologie OCT-A qu'il a coinventée, à l'Oregon Health & Science University à Portland, Oregon. (avec l’aimable autorisation de Monsieur David Huang, M.D., Ph.D.)
Contrairement à l’OCT, qui se concentre sur la structure tissulaire de la rétine, l'OCT-A permet de visualiser les vaisseaux artériels, veineux et capillaires, en haute résolution et en trois dimensions. Grâce à l'OCT-A, les cliniciens peuvent ainsi détecter précocement les anomalies vasculaires les plus fines et surveiller leur évolution de manière régulière.
Cette technologie a révolutionné le diagnostic et la prise en charge de nombreuses pathologies telles que la rétinopathie diabétique, la DMLA, les occlusions capillaires ou le glaucome. Jusqu’alors, l’angiographie à la fluorescéine ou au vert d’indocyanine était la méthode de référence pour visualiser la vascularité rétinienne et choroïdienne. A l’inverse, l’OCT-A peut être réalisée sans produit de contraste, éliminant ainsi l’intraveineuse, les contraintes d’un protocole long et rigoureux, ainsi que les effets indésirables, le risque allergique voire anaphylactique liés aux produits de contraste, qui, bien que rares, sont réels. « C’est une révolution. L’examen dure quelques dizaines de secondes. L’OCT-A a changé les paradigmes que ce soit pour le diagnostic ou le suivi des patients », confirme le Docteur Alexandra Miere, MCU-PH au CHI de Créteil.
Une technologie en évolution depuis 10 ans
Au cours de la dernière décennie, l'OCT-A d'Optovue a connu des améliorations significatives. Que ce soit en termes de compensation des mouvements oculaires, de résolutions d'images, de réductions des artefacts, de vitesse d'acquisition, de taille de la fenêtre d'acquisition, passée de 3x3 et 12x12 pour le dernier modèle Optovue Solix. La qualité d'image a ainsi été perfectionnée. De nouveaux biomarqueurs, comme la densité vasculaire parafovéolaire ou péripapillaire, ont aussi été ajoutés.
Analyses quantitatives apportées par l’OCT permettant d’évaluer la réponse thérapeutique et d’influencer le traitement (avec l’aimable autorisation de Monsieur Adil El Maftouhi, Genève).
Des progrès cliniques indiscutables
L’OCT-A permet aujourd’hui une précision accrue dans l’analyse sémiologique, la visualisation de l’architecture néovasculaire le diagnostic et, in fine une plus grande réactivité dans l’administration des traitements et une meilleure évaluation de leur efficacité. « Avec l’OCT-A, on peut détecter la présence de néovaisseaux avant même les premiers signes d’exsudation. Or, le pronostic visuel et fonctionnel sera meilleur si les traitements sont réalisés de manière beaucoup plus précoce », explique Monsieur Adil El Maftouhi, Orthoptiste spécialisé en imagerie oculaire à Genève.
L’hôpital de Lariboisière a été l’un des premiers centres équipés de l’OCT-A. Le Docteur Ali Erginay peut donc lui aussi témoigner de la manière dont elle a bouleversé sa pratique. « L’OCT-A a été une grande révolution. Avec l’angiographie, vous voyiez les vaisseaux en 2D. Avec l’OCT-A, vous voyez les vaisseaux couche par couche, en 3D. C’est devenu une technique indispensable qui a modifié certaines conduites à tenir, certains schémas thérapeutiques et les fréquences de suivi. Grâce à ce système, la classification de la DMLA a été modifiée. L’OCT-A est devenu un examen de première intention dans plusieurs domaines. Aujourd’hui, elle anime les débats. Va-t-elle, à termes, remplacer l’angiographie classique et l’ICG ? En fait, pour certaines pathologies, c’est déjà le cas », observe-t-il, enthousiaste.
Visualisation OCT-A 3D dans un cas de maladie de Best pour mieux identifier la morphologie des néovaisseaux (avec l’aimable autorisation de Monsieur Adil El Maftouhi, Genève).
Une recherche dynamisée et des perspectives prometteuses
L'OCT-A, parce qu’elle donne la possibilité de recueillir une quantité importante d’informations sur différents biomarqueurs, et ce de façon fréquente, a rapidement été adoptée par les chercheurs. Le nombre d’articles scientifiques consacrés aux pathologies vasculaires, suite à des études menées avec l’OCT-A, ont augmenté de façon spectaculaire depuis 10 ans. On en compte plusieurs milliers à travers le monde.
L'OCT-A est ainsi devenue un outil précieux dans l’approche des maladies rétiniennes. D’autant que des améliorations logicielles ont été réalisées pour faciliter l'interprétation des images et pour automatiser l'analyse quantitative des données. En cela, l’intelligence artificielle, combinée à l’OCT-A, devrait jouer un rôle central dans les années à venir pour faciliter la détection précoce de pathologies comme la néovascularisation choroïdienne. « L’OCT-A n’a pas fini de nous étonner », assure le Docteur Ali Erginay.